Le groupe Element Beauty s’est associé à Oco, une filiale de la société canadienne Carbon Upcycling Technologies, pour développer un matériau adapté aux emballages cosmétiques à partir de CO2 capturé et de matériaux recyclés post-consommation (PCR). L’innovation vient de faire ses débuts chez Sephora avec la marque de maquillage californienne Caliray. Selon Element Beauty, le nouveau tube offre une résistance, une durabilité et un potentiel de recyclage améliorés tout en contribuant à la réduction des gaz à effet de serre grâce au carbone capturé qu’il contient.
Carbone et plastiques recyclés
Cette combinaison inédite est-elle l’avenir ultra-durable de l’emballage cosmétique ? Premium Beauty News s’est entretenu avec Nick Gardner, cofondateur d’Element Beauty Group, pour qui, combiner capture du carbone et plastique recyclé « a davantage de sens » pour l’industrie.
« En fait, le processus de piégeage [du carbone] consomme une certaine quantité d’énergie, juste pour piéger ce CO2 (…) donc je dirais que l’utiliser avec des plastiques recyclés, plutôt que de le mélanger avec des plastiques vierges ou d’autres matériaux d’emballage, est une très bonne option », explique Nick Gardner.
Si du carbone capturé a déjà été intégré différents matériaux – des plastiques vierges, des parfums ou même du béton – le dirigeant estime que son intégration dans des matériaux d’emballage recyclés post-consommation (PCR) en augmente encore l’intérêt environnemental.
« Pour les plastiques, en général, les taux de recyclage sont très, très faibles dans l’industrie de la beauté », souligne-t-il. « Je me suis dit : si cela doit finir dans une décharge (…) ne serait-il pas préférable de créer un piège à carbone ? Un puits, en quelque sorte. Nous avons donc procédé ainsi. (…) Nous produisons de meilleurs déchets. »
Au-delà, Nick Gardner indique que l’additif à forte teneur en carbone permet également de renforcer le matériau PCR pour une utilisation dans un tube cosmétique, le rendant plus endurant et plus adapté aux systèmes de recyclage mécanique existants
« Nous essayons de créer un recyclage et une utilisation plus efficace des déchets ».
Quel avenir pour la capture de carbone ?
Pour Nick Gardner, la capture du carbone sous ses nombreuses formes reste une « industrie extrêmement intéressante » pleine de promesses. « Je crois sincèrement que c’est l’avenir, et si quelque chose peut être fait pour le réchauffement climatique, il faut éliminer et capturer le CO2. Tout comme le méthane, évidemment ».
Pour Element Beauty, l’origine du carbone capturé était un point important de ce projet. Grâce à son partenariat avec Oco, l’entreprise a utilisé du carbone séquestré à grande échelle par des centrales de production électrique - des émissions qui autrement entreraient dans l’atmosphère - par opposition au CO2 déjà présent dans l’air. À l’aide d’un procédé breveté, ce CO2 est ensuite mélangé à du silicate de magnésium inorganique pour créer un additif qui peut être intégré dans les plastiques recyclés post-consommation.
Alors que plusieurs composés de matières premières ont été testés, Gardner a déclaré que le silicate de magnésium a finalement été choisi car il est « très inerte » et « facilement disponible » à moindre coût.
Après environ un an et demi de développement — du concept au remplissage final, en passant par les tests — Element Beauty propose une gamme pour emballages cosmétiques intégrant entre 15 et 30% de carbone piégé, notamment des mascaras, des poudriers, des brillants à lèvres et des tubes.
Nombreux défis
Interrogé sur l’intérêt de l’industrie pour ce type d’emballage, Nick Gardner répond : « J’aimerais penser qu’il y en a beaucoup. »
Il indique toutefois qu’il reste clairement des défis à relever pour la production à échelle industrielle de ce type d’emballage.
Bien que la combinaison PCR-carbone capturé soit facile à intégrer dans les processus de fabrication des emballages existants, Nick Gardner estime que toutes les parties prenantes ne sont pas enthousiastes. Il considère aussi que l’éducation des consommateurs sera essentielle pour le succès de ce matériau, dans la mesure où le principe de la capture du carbone n’est pas facile à comprendre.
Pour l’avenir, Element Beauty est disposé à partager son processus sous licence avec d’autres acteurs, afin que car cela des volumes encore plus importants de CO2 puissent être séquestrés et intégré sdans les emballages de produits de beauté. « Ce que j’aimerais, c’est que les grandes entreprises étudient cette question et l’utilisent réellement, mais à grande échelle ».
L’entreprise souhaite également élargir la technologie au-delà du secteur de la beauté.
Nick Gardner explique être confiant quant au potentiel de développement de ce matériau et la création d’un véritable impact dans le secteur des emballages beauté, en particulier pour les éléments de petite taille, comme les bouchons de parfum, les palettes de fards à paupières, les boîtiers, les rouges à lèvres et les mascaras. « Il n’y a presque rien qui ne puisse l’intégrer », a-t-il déclaré.