Mi-octobre, après une alerte de l’Anses, le ministère de la Santé et de la répression des fraudes ont déconseillé aux coiffeurs et aux consommateurs les produits capillaires de lissage brésilien, très répandus sur le marché, contenant de l’acide glyoxylique. À l’origine de cette alerte : quatre cas d’insuffisance rénale aiguë - encore en cours d’expertise - guéris au terme d’une hospitalisation, chez des personnes ayant utilisé des produits capillaires intégrant cet ingrédient "potentiellement toxique".

"Il est rare d’avoir des effets généraux", explique à l’AFP le Dr Juliette Bloch, directrice des alertes et des vigilances sanitaires à l’Anses. Le plus souvent, les effets indésirables sont limités à la zone d’application du produit cosmétique, "cela peut être de la dépigmentation, de l’alopécie..."

Depuis le 1er janvier, l’Anses a vu ses missions élargies à la vigilance et à l’expertise sur les produits cosmétiques et de tatouage - jusqu’alors confiée à l’Agence du médicament (ANSM). La direction de la répression des fraudes continue, elle, de surveiller la conformité de ces produits à la règlementation et peut imposer des retraits du marché.

La mise en garde de l’Anses sur l’acide glyoxylique pourrait déboucher sur une modification de sa réglementation européenne, après décision d’un comité d’expert puis vote des 27 pays de l’UE.

Le chantier est vaste. Sur quelque 30.000 ingrédients cosmétiques utilisés dans l’UE, seuls "quelques milliers sont interdits et quelques centaines réglementés", précise Sandrine Charles, cheffe de projet "produits cosmétiques" à l’Anses. "Donc des milliers n’ont jamais été réglementés par l’Europe."

Un système peu connu des consommateurs

Actuellement, la surveillance des effets indésirables est une obligation confiée au fabricant, chargé d’adopter des mesures de correction ou de prévention lorsqu’il en a connaissance.

Mais les consommateurs, comme les coiffeurs ou esthéticiens, participent aussi à mieux protéger la santé de tous, en signalant des effets indésirables —allergie, intoxication, inflammation, réaction anormale... — sur le portail signalement.social-sante.gouv.fr.

Et cela, que l’usage du produit cosmétique —crème, produit solaire, dentifrice, savon, déodorant, sels de bains, parfum, vernis— ait été conforme au mode d’emploi ou non : erreur de mélange, de dosage, temps de pause non respecté...

"Signaler à l’industriel, à nous, c’est fondamental", souligne le Dr Bloch, consciente que peu de consommateurs ont ce réflexe car "les gens se disent : ’Ca n’est pas intéressant, ce qu’il m’arrive ; ça y est, c’est fini...’."

"On sait que ce qui nous remonte, c’est une toute petite partie" des cas, mais "il vaut mieux signaler trop que pas assez", insiste-t-elle.

La "cosmétovigilance" s’accompagne d’une "tatouvigilance" qui surveille les potentiels effets indésirables provoqués par les encres de tatouage. "Généralement, ce n’est pas très grave : on nous signale surtout des allergies, des infections locales. Certaines personnes nous signalent des résultats esthétiques non conformes" mais c’est hors du champ d’action de l’Anses, explique le Dr Bloch.

Dans ce domine, le signalement le plus efficace semble être celui des tatoueurs. Dans le cas d’infections repérées après chez des clients après l’utilisation d’une certaine encre, il a été possible d’identifier le produit afin de le retirer du marché, précise-t-elle. "Il y a beaucoup de pratiques non conformes : certains se font tatouer à domicile par des gens plus ou moins respectueux de l’hygiène", glisse le Dr Bloch, mentionnant un type de signalement transmis aux Agences régionale de santé (ARS).